Weizmann (Israël) : un microscope à ultra-haute résolution grâce à la physique quantique et les lasers

(l-r) Ron Tenne, Prof. Dan Oron, Bat El Raphel and Uri Rossman (l-r) Ron Tenne, Prof. Dan Oron, Bat El Raphel and Uri Rossman

Une équipe de chercheurs menée par le Prof. Yaron Silberberg et le Prof. Dan Oron de l’Institut Weizmann a développé une nouvelle technique de microscopie dite de super-résolution, basée sur la mécanique quantique. Les techniques de super-résolution permettent d’obtenir l’image d’objets qui ne peuvent pas être distingués avec les microscopes standards que l’on trouve dans les collèges et les lycées. Le développement de ces techniques a complètement bouleversé les domaines de l’imagerie médicale et de la biologie. Les chercheurs de l’Institut Weizmann viennent d’ajouter leur pierre à l’édifice.

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A g. image d’un objet prise à l’aide d’un microscope standard. d. Le même objet observé par les chercheurs de Weizmann. (Crédits : Ron Tenne/Uri Rossman/Bat El Rephael) 

A la fin du 19ème siècle, le physicien allemand Ernst Abbe a déterminé que l’image d’un point par la lentille la plus parfaite ou bien par l’objectif de microscope le plus parfait ne sera jamais un point mais plutôt une tâche diffuse, dont la taille limite est dictée par les lois de la physique. Il est important de comprendre qu’un microscope, même le plus basique, permet de collecter la lumière d’objets extrêmement petits. Cela veut dire qu’à l’aide d’un objectif de microscope relativement simple, on pourrait collecter la lumière émise par un seul atome (dont le rayon est d’environ 10-11 m) et on observerait alors sur notre caméra une tâche diffuse indiquant la présence de l’atome. En revanche, si deux atomes qui émettent de la lumière sont très proches, on ne pourrait pas distinguer l’un de l’autre. La distance minimale entre les deux atomes en deçà de laquelle on ne pourrait plus les distinguer est appelée la résolution d’un microscope. En règle générale, un microscope optique ne peut distinguer deux objets séparés de moins de la moitié d’une longueur d’onde de la lumière utilisée pour éclairer l’objet. Cela correspond en pratique à une limite de résolution de l’ordre de 200 nanomètres si la lumière utilisée est bleue.

Lorsque Ernst Abbe a énoncé sa limite, il a émis plusieurs hypothèses quant à la façon dont le microscope utilisé fonctionne. Ses hypothèses étaient basées sur le bon sens et il aura fallu attendre plus d’un siècle pour que Stefan Hell parvienne à contourner l’une des hypothèses d’Abbe, inventant alors le premier microscope dit de super-résolution. Cette invention lui a valu, ainsi qu’à deux autres physiciens, le prix Nobel de chimie en 2014. Ces nouvelles techniques de microscopie, dont les principales sont appelées STED et PALM, permettent de distinguer deux objets séparés de l’ordre de quelques nanomètres et ont complètement bouleversé les domaines de l’imagerie médicale et de la biologie.

Contrairement aux techniques citées ci-dessus, des chercheurs de l’Institut Weizmann ont eu pour idée d’utiliser la nature quantique de la lumière afin de passer outre la limite d’Abbe. L’équipe dirigée par les professeurs Dan Oron et Yaron Silberberg a réussi cet exploit en observant des photons uniques émis par des molécules uniques. En appliquant les lois de la mécanique quantique et en regardant les temps d’arrivée des photons, les chercheurs sont parvenus à observer des objets séparés de l’ordre de 80 nanomètres. Son originalité et le fait qu’il n’est nécessaire de modifier légèrement des microscopes disponibles dans le commerce pour l’appliquer font de cette nouvelle technique un incontournable du domaine.

Publication dans Nature 17 décembre 2018

Rédacteur : Arnaud Courvoisier, doctorant à l’Institut Weizmann pour le BVST

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