Alerte ONU – OMS sur l’antibiorésistance. Heureusement, des chercheurs israéliens ont trouvé la parade !

Dr Keiji Fukuda, Représentant spécial du Directeur général de l'OMS pour la résistance aux antimicrobiens Dr Keiji Fukuda, Représentant spécial du Directeur général de l'OMS pour la résistance aux antimicrobiens

C’est un coup de tonnerre qui vient de secouer la communauté internationale : l’ONU et l’OMS demandent la mobilisation générale de tous les Etats pour faire face à la résistance antimicrobienne qui représente une grave menace pour la santé humaine, le développement et la sécurité. Récemment, l’ESCMID (Société européenne pour la microbiologie clinique et les maladies infectieuses), avait également prédit une « Apocalypse des antibiotiques en France d’ici à 2025 avec la propagation de bactéries résistantes… qui pourrait provoquer un million de morts ».

A cette occasion, Israël Science Info tient à rappeler que l’Université de Tel Aviv a fait une avancée majeure qui pourrait permettre de sauver des milliers de vies. Dans des travaux publiés il y a un an, le chercheur israélien Udi Qimron avait présenté les mécanismes permettant de rendre les supermicrobes à nouveau sensibles aux antibiotiques. Israël Science Info souligne l’importance vitale des travaux du Pr Udi Qimron qui sont d’une portée universelle.

Les travaux remarquablement innovants de l’équipe du Pr Udi Qimron, à l’Université de Tel Aviv (et du Dr Ido Yosef, avec Ruth Kiro et Shahar Molshanski-Mor, doctorants au département d’immunologie et de microbiologie cliniques) et de deux scientifiques américains, le Dr Sara L. Milam et le Pr Harold P. Erickson, de la Duke University Medical Center, menés depuis plusieurs années, portent sur la possibilité de rendre les bactéries résistantes à nouveau sensibles aux antibiotiques.

Prof Udi Qimron, Tel Aviv UniversityPr Udi Qimron, Université de Tel Aviv

Un voyage dans le temps

En d’autres termes, de les faire « revenir en arrière ». Les premiers résultats de ces travaux sont très prometteurs. Parce que les bactéries et les virus ont évolué conjointement pendant des millions d’années, le Pr Qimron a eu l’idée que les virus pouvaient contenir des armes essentielles à la destruction des bactéries. L’équipe du Pr Qimron s’est intéressée à des virus particuliers, les phages (ou bactériophages). Ces virus infectent les bactéries et s’y répliquent. Comme tout virus infectant une cellule, le phage s’attaque à l’ADN du noyau de la cellule qu’il infeste et le modifie. Ces phages sont extrêmement nombreux à la surface de  la terre et on estime qu’ils existent dans une proportion de 10 pour une bactérie. « Deux ans et demi de recherche ont été nécessaires pour étudier les 56 protéines d’un virus qui infecte une bactérie puis à localiser les mutations des gènes qui  aident la bactérie à résister à la toxicité des protéines produites par le virus. Grâce à des techniques de séquençage à haut débit de l’ADN, les chercheurs ont identifié une nouvelle petite protéine (Gp 0,6) qui inhibe une autre protéine nécessaire à la survie de la bactérie », commente le Dr Sivan Cohen Wiesenfeld, rédactrice en chef du site des Amis français l’Université de Tel Aviv et membre du comité scientifique d’Israël Science Info. L’étude portait sur certains types de bactéries (escherichia coli) et donc certains phages spécifiques à ces bactéries (E coli phage T7). Mais il est probable que la même méthode pourrait être appliquée à toutes les superbactéries. Il reste encore un long chemin avant que ces recherches conduisent à de nouveaux traitements qui remplaceraient les antibiotiques ou leur permettraient de retrouver leur efficacité. Cette nouvelle approche offre d’immenses promesses, dans un domaine, où pour le moment, la recherche tardait à apporter des solutions.

Cendrine Barruyer et Esther Amar fondatrice d’Israël Science Info

Publication dans PNAS, janvier 2015

Article déjà publié en 2015.

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* Lire aussi : L’ONU et l’OMS appellent à la mobilisation générale

Après le VIH, les maladies non transmissibles et Ebola, l’antibiorésistance est la quatrième question de santé à entrer dans l’agenda des instances internationales. « La résistance antimicrobienne pose une menace fondamentale sur le long terme à la santé humaine, la production durable de nourriture et au développement », a déclaré le secrétaire général de l’ONU, Ban Ki-moon, en ouverture de la première réunion de haut niveau sur le sujet. « Nous sommes en train de perdre notre capacité à protéger tant les humains que les animaux d’infections mortelles », a-t-il ajouté.

Un tsunami au ralenti

Dans la Déclaration qu’ils ont adoptée à l’issue de cette réunion solennelle, les chefs d’État et de gouvernement se sont engagés à élaborer des plans d’action nationaux en se basant sur le Plan d’action mondial pour lutter contre la résistance aux antimicrobiens, que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a élaboré en 2015, en coordination avec l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) et l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE).

« La résistance aux antimicrobiens représente une grave menace pour la santé humaine, le développement et la sécurité. Les engagements pris aujourd’hui doivent être concrétisés en actions rapides, efficaces et capables de sauver des vies dans les secteurs de la santé humaine, animale et environnementale. Le temps presse », a prévenu le Dr Margaret Chan, directrice générale de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). « Certains scientifiques parlent de tsunami au ralenti », a-t-elle aussi indiqué.

La hausse des résistances aux antimicrobiens est le résultat de l’abus et de la mauvaise utilisation des antibiotiques et des autres antimicrobiens chez les humains, les animaux (y compris les poissons d’élevage) et sur les cultures, ainsi que de la propagation des résidus de ces médicaments dans le sol, les cultures et l’eau, rappellent les instances internationales.

Un bilan dans un an

Les dirigeants ont appelé l’OMS, la FAO et l’OIE, en collaboration avec des banques de développement comme la Banque mondiale – qui a publié au début de la semaine un rapport alarmant sur le sujet, à coordonner leur planification et leurs actions et à en rendre compte à l’Assemblée générale de l’ONU qui se tiendra en septembre 2018.

Tout comme les représentants de la société civile, l’industrie pharmaceutique était aussi présente. À la veille de la réunion, 13 grands groupes ont présenté une feuille de route afin de réduire la résistance aux antimicrobiens d’ici à 2020. Leurs engagements s’inscrivent dans le prolongement des principes identifiés dans une précédente déclaration signée lors du Forum économique mondial de Davos au début de l’année.

Ces entreprises se sont engagées à : réduire l’impact environnemental de la production d’antibiotiques ; faire en sorte que les antibiotiques ne soient utilisés que par les patients qui en ont besoin ; améliorer l’accès aux antibiotiques et aux vaccins actuels et futurs à l’échelle mondiale ; explorer de nouvelles opportunités de collaboration ouverte entre le secteur pharmaceutique et le secteur public.

Source Le Quotidien du Médecin

Israël Science Info