Weizmann et Université de Jérusalem (Israël) : des pigments anti-cancer issus de légumes et fleurs OGM

Unripe (top) and ripe (bottom) tomatoes. Regular tomatoes (far left) start out green and turn red when ripe. In contrast, genetically engineered tomatoes assume different shades of red-violet, depending on whether they produce betalains (second from left), pigments called anthocyanins (second from right) or betalains together with anthocyanins (far right) Unripe (top) and ripe (bottom) tomatoes. Regular tomatoes (far left) start out green and turn red when ripe. In contrast, genetically engineered tomatoes assume different shades of red-violet, depending on whether they produce betalains (second from left), pigments called anthocyanins (second from right) or betalains together with anthocyanins (far right)

La couleur de nos fruits et légumes est révélatrice des différents pigments qui la composent. Chacun de ces pigments possède des propriétés de grand intérêt pour le corps humain. Le Pr Asaph Aharoni et le Dr Guy Polturak de l’Institut Weizmann des Sciences en Israël a réussi à modifier génétiquement un grand nombre de légumes et de fleurs afin qu’ils produisent différents pigments possédant, notamment, des propriétés anticancéreuses. L’équipe de recherche comprenait également Noam Grossman, Yonghui Dong, Margarita Pliner et Ilana Rogachev du département des plantes et des sciences de l’environnement de Weizmann, ainsi que Maggie Levy, David Vela-Corcia et Adi Nudel de l’Université Hébraïque de Jérusalem.

La multitude des couleurs des végétaux qui nous entourent n’est pas uniquement le fruit de mutations aléatoires et fortuites qui ne trouvent d’utilité que pour le plaisir de nos yeux. Il a par exemple été mis en évidence que les pigments attirent les insectes pollinisateurs ou encore qu’ils protègent les végétaux de certaines maladies. Il existe trois catégories principales de pigments qui génèrent la quasi-totalité des couleurs du monde végétal : les anthocyanes, les caroténoïdes et les bétalaïnes. Chacune de ces familles présente des caractéristiques très particulières, incluant des propriétés antioxydantes, anti-inflammatoires ou anticancéreuses. Les pigments sont donc fort intéressants pour la communauté scientifique.

Le Pr Asaph Aharoni, le Dr Guy Polturak et ses étudiants se sont intéressés à une classe de pigments, appelée bétalaïne, présents notamment dans les betteraves rouges, les cactus, les bougainvilliers et bien d’autres végétaux. Ils ont observé deux plantes produisant des bétalaïnes : les betteraves rouges et les belles-de-nuit (Mirabilis jalapa). Après un travail méticuleux, ils ont pu retracer le gène permettant la production des bétalaïnes, ainsi que les mécanismes métaboliques conduisant à leur fabrication ; ceux-ci utilisent la tyrosine (un acide aminé) comme briques élémentaires.

Tobacco flowers in nature are pale pink (far left), but can take on new colors (three images on the right) when genetically engineered to produce betalains

Tobacco flowers in nature are pale pink (far left), but can take on new colors (three images on the right) when genetically engineered to produce betalains

Pour étayer et élargir leurs expériences, les chercheurs ont ensuite greffé le gène dans des levures pour leur faire produire, avec succès, la couleur désirée. Après ce premier test, ils ont greffé ce gène dans des tomates ou encore des pommes de terre et ont ainsi réussi à leurs donner différentes couleurs. Ils ont également réussi à contrôler la zone de production de ces pigments, limitant par exemple la couleur aux fruits de la tomate.

Cette découverte, qui pourrait sembler esthétique, s’avère d’une utilité certaine. La teneur en bétalaïnes accroît la valeur nutritive des fruits et légumes. De plus, ces pigments luttent activement contre le Botrytis Cinerea, une espèce de champignon (caractéristique des fraises trop mûres), qui détruit chaque année des végétaux comestibles à hauteur de plusieurs milliards de dollars. Enfin, les chercheurs sont également en mesure de produire à grande échelle ce pigment de façon économique ; une fois extrait, ce dernier permet de fabriquer des médicaments de première nécessité à forte valeur ajoutée.

Rédacteur : Samuel Cousin, post-doctorant à l’Institut Weizmann pour le BVST

Publication dans PNAS, 13 juillet 2017

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