L’université Bar-Ilan (Israël) s’inspire du cerveau humain pour créer des IA nouvelle génération

Processing an event with multiple objects. A synchronous input where all objects are presented simultaneously to a computer (left), versus an asynchronous input where objects are presented with temporal order to the brain (right). Credit : Prof. Ido Kanter, Bar-Ilan University Processing an event with multiple objects. A synchronous input where all objects are presented simultaneously to a computer (left), versus an asynchronous input where objects are presented with temporal order to the brain (right). Credit : Prof. Ido Kanter, Bar-Ilan University

Des chercheurs de l’Université Bar-Ilan ont mis au point un programme d’intelligence artificielle dont les capacités analytiques surpassent celles des programmes usuels en s’inspirant du fonctionnement du cerveau humain. Des robots qui marchent, parlent, interagissent et ressemblent à s’y méprendre à des êtres humains, le cinéma de science-fiction en rêve. Pourtant, près de 70 ans après les premières réflexions d’Alan Turing sur l’intelligence de la machine, pas de cyborgs ni d’androïdes dans nos rues.

Bien entendu, notre société est marquée par nombre d’applications « intelligentes » comme les tentatives de voitures autonomes ou encore le très célèbre programme Deep Blue, qui battit le champion du monde d’échec Garry Kasparov en 1997. Mais nous sommes encore bien loin de l’humanoïde autonome tel que fantasmé par l’industrie du septième art.

L’intelligence artificielle (IA) est l’aptitude d’un ordinateur ou d’un programme à penser, apprendre et à s’auto-corriger sur la base de l’acquisition et du traitement raisonné d’information. Elle apprend du monde qui l’entoure grâce à des algorithmes d’apprentissage générés par des assemblages d’unités semblables à des neurones et capables de reconnaître les relations implicites dans un jeu de données, le tout en mimant le fonctionnement du cerveau humain. Cependant, si notre cerveau traite l’information qu’il reçoit de façon séquentielle et peut s’adapter à un environnement changeant, les algorithmes d’apprentissage conventionnels reçoivent et traitent toutes les données simultanément.

La différence peut sembler ténue, mais elle a son importance. Le piéton qui traverse une rue, les panneaux de signalisation et les voitures des autres automobilistes sont autant d’éléments auxquels notre cerveau attribue spontanément une temporalité et une spatialité relative si bien que le piéton aura d’autant plus de poids dans notre prise de décision qu’il est vulnérable et proche de notre véhicule dans le temps et dans l’espace et ce, en dépit du feu de signalisation passé au vert. L’absence de temporalité dans les algorithmes classiques implique que le même poids est attribué à toutes les informations, si bien que l’importance relative des signaux doit être apprise au cours de sessions d’entraînement où un observateur humain enseigne à la machine des règles explicites de priorisation.

Dans un article publié en août 2019 dans Science Reports, une équipe scientifique du Département de Physique et du Centre pour la recherche sur le cerveau Gonda (Goldschmied) de l’Université Bar-Ilan, dirigée par Prof. Ido Kanter, a mis au point un nouveau type d’algorithme ultra-rapide dont les performances ont surpassé celles des algorithmes d’apprentissage les plus modernes. Ce programme acquiert et traite les données de façon séquentielle ce qui lui permet de s’adapter à un environnement en constante évolution, sans perte de temps de calcul et sans intervention humaine.

Dans une interview accordée à l’Université Bar-Ilan, Prof. Kanter explique que « le cerveau humain est une machine extrêmement lente dont le schéma d’apprentissage complexe est très éloigné des designs artificiels » mais que le « désavantage que constitue normalement cette complexité se révèle être un avantage » dans ce cas précis. En effet, la vitesse de calcul est étonnamment indépendante de la complexité du réseau de « neurones » qui composent l’algorithme, et la machine peut désormais fonctionner par auto-adaptation, en dehors du schéma classique d’apprentissage par étape.

Cette découverte ouvre la voie vers un nouveau type d’IA mêlant les neurosciences et l’intelligence artificielle, à une époque où les deux disciplines sont considérées comme singulièrement différentes par la communauté scientifique. En outre, elle relance la réflexion sur l’influence des systèmes biologiques sur le développement des technologies du futur, notamment celles visant à mimer l’intelligence humaine.

Auteur : Camille Bordes pour le BVST, doctorante à l’Université Bar-Ilan

Sources :

 

Israël Science Info