Technion (Israël) : Pr Shwartz et Dr Colléony (France) « les espèces invasives d’oiseaux gagnent face aux espèces locales »

Invasive common myna (Acridotheres tristis); photographer: Ehud Fast Invasive common myna (Acridotheres tristis); photographer: Ehud Fast

Les chercheurs en protection des espèces basés au Technion (Israël), le Dr Agathe Colléony (française) et le Professeur adjoint Assaf Shwartz (israélien) étudient les populations d’oiseaux communes en Israël depuis 15 ans. Leur constat est alarmant : les espèces d’oiseaux exotiques envahissantes sont en plein essor et les espèces indigènes sont en déclin. «Il est urgent de définir des stratégies appropriées pour arrêter ou atténuer la propagation des oiseaux non indigènes, en particulier le myna commun », a déclaré le Dr Agathe Colléony.

75% des espèces d’oiseaux les plus courantes en Israël sont en déclin depuis 15 ans, alors que les populations de trois espèces d’oiseaux exotiques envahissantes non indigènes explosent à des niveaux compris entre 250% et 843%. Parmi les espèces d’oiseaux en déclin rapide figurent le moineau domestique (Passer domesticus) qui a diminué de 28% et le bulbul à oreillons blancs (Pycnonotus xanthopygos) qui a diminué de 45%).

Dr Agathe Colléony

Dr Agathe Colléony

Agathe Colléony possède un doctorat en conservation des espèces du Musée d’histoire naturelle de Paris. Elle travaille actuellement avec le Pr Assaf Shwartz sur plusieurs projets concernant les relations homme-nature. « Nous étudions la déconnexion progressive des personnes par rapport la nature, ses causes et conséquences en termes de santé et de bien-être pour les êtres humains, ainsi que la protection de l’environnement. Nous utilisons des méthodes de recherche quantitatives, avec des enquêtes par questionnaire et des expériences comportementales. Une meilleure compréhension de l’évolution de la nature permettrait de contribuer au bien-être humain et d’affiner des stratégies visant à promouvoir les interactions avec la nature pour l’aménagement du paysage urbain en fournissant des directives spécifiques pour la construction de villes plus vertes et plus durables. Je suis diplômée en écologie, éthologie et biologie de la conservation. Lors de ma thèse de doctorat, j’ai étudié comment des zoos peuvent modifier les comportements de protection de la nature en reconnectant les individus aux questions liées à la nature et à la conservation, avec une approche interdisciplinaire liant l’écologie et les sciences sociales ».

 

Oiseau de Palestine (Palestine Sunbird)

Oiseau de Palestine (Palestine Sunbird)

« Les espèces avec lesquelles nous avons grandi sont en déclin », a déclaré le Pr Shwartz, de la faculté d’architecture et d’urbanisme du Technion (Institut israélien de technologie). «Je crains que, bientôt, mes enfants ne soient plus en mesure de voir, d’entendre et d’interagir avec le moineau, le bulbul et l’oiseau de Palestine qui étaient très répandus en Israël. Il y a près de deux décennies, nous avons commencé à étudier l’effet des oiseaux exotiques envahissants sur les oiseaux locaux. Nous avons constaté que les mynas communs surpassent certaines espèces locales ont également montré des comportements agressifs envers d’autres espèces d’oiseaux indigènes », a déclaré le Pr Shwartz. Cette étude démontre que trois espèces d’oiseaux envahissants qui se répandent de plus en plus dans le pays, la myna commune (Acridotheres tristis) et deux espèces de perruches (Psittacula krameria et Myiopsitta monachus) prospèrent alors que plusieurs espèces indigènes sont en déclin.

Pr Assaf Shwartz

Pr Assaf Shwartz

« Malheureusement, cette étude montre que nos prévisions deviennent maintenant la réalité en Israël », a déclaré le Pr Shwartz. Les changements d’affectation des terres, en particulier l’urbanisation, repoussent de nombreuses espèces, tout en favorisant d’autres qui prospèrent dans les nouvelles conditions environnementales. Les espèces indigènes communes considérées comme «gagnantes» dans ce processus sont maintenant des «perdantes». Les «gagnants» ultimes sont les espèces non indigènes. Bien que les tendances négatives semblent jusqu’à présent relativement limitées aux paysages dominés par l’homme (principalement les zones résidentielles), certains signes indiquent que ces effets pourraient bientôt atteindre des paysages plus naturels. L’étude souligne l’importance de définir des stratégies de gestion appropriées pour arrêter ou atténuer la propagation des oiseaux non indigènes. Les chercheurs prédisent que les communautés d’oiseaux seront de plus en plus homogènes et dominées par des espèces non indigènes.

Publication dans Biological Conservation,17 déc. 2019

Traduit et adapté par Esther Amar pour Israël Science Info

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